
Les nuisances sonores engendrent une dépréciation des biens immobiliers selon Bruitparif. ©MarieFiachetti/D9
Paris est une ville bruyante, et les habitants du 9e arrondissement ne disent pas le contraire. Venus en nombre hier soir à l’école de Clichy, ils ont fait entendre leur mécontentement lors d’une réunion publique d’information sur la pollution sonore. Celle-ci était organisée par l’observatoire du bruit en Ile-de-France Bruitparif et le conseil de quartier Blanche-Trinité. À écouter Fanny Mietlicki, la directrice de l’observatoire qui s’exprimait lors de cette réunion, la grogne des habitants du 9e semble être justifiée : «L'Organisation mondiale de la santé classe le bruit en deuxième place des causes environnementales nocives, derrière la pollution atmosphérique. Le bruit peut avoir de multiples conséquences sur le corps humain : perte de l’audition, sensation auditive anormale, troubles du sommeil, anxiété, irritation, stress ou encore manque de concentration.»
Dans le 9e, ces effets poussent certains habitants à bout. Leur colère porte sur deux facteurs de pollution sonore en particulier : la circulation et le tapage nocturne causé par les clients des bars et restaurants, qui s'accumulent parfois sur les trottoirs.
Fêtards et fumeurs sans gêne
Françoise habite rue Pigalle depuis vingt ans. Chaque année, dès l'arrivée des beaux jours, elle est systématiquement dérangée par les clients d'un restaurant en bas de chez elle: «Depuis l'arrivée du nouveau gérant, c'est infernal. Dès qu'il fait beau, il recommence à ouvrir les fenêtres, à poser ses tables dehors. Le bruit dure jusque tard dans la nuit, deux heures voire trois heures du matin ! Pourtant les deux autres restaurants de la rue ne dérangent personne, ils demandent à leurs clients d'être discrets quand ils sont dehors. Ici, c'est bien une question d'incivilité.» Comme pour Françoise, le manque de courtoisie des clients, qui sortent boire et fumer et s'approprient parfois l'espace public, excède les habitants. «Paris est une ville festive, touristique, elle ne veut pas devenir une ville morte», souligne Fanny Mietlicki. «Mais il y a des riverains qui aspirent à vivre et dormir paisiblement et cela doit être respecté.»
Alors, que faire quand les clients d'un commerce font du tapage nocturne et dérangent les riverains ? A Paris, les autorisations d'ouverture des bars et restaurants sont diverses mais fixent généralement la fermeture de ces établissements aux alentours de 2 heures du matin. Pour autant, le tapage nocturne reste interdit. Si des clients présents sur la voie publique sont trop bruyants, il est conseillé de contacter le commissariat central de l'arrondissement. « La brigade de nuit patrouille le soir et effectue régulièrement des contrôles », explique Alexis Govciyan, le premier adjoint à la maire du 9e. « Nous attachons beaucoup d'importance à la prise en compte des difficultés des habitants et des commerçants. Il nous arrive de convoquer les riverains, les gérants, et le commissariat afin de faire le point, car c'est souvent une question de médiation. Si le problème ne se règle pas, on peut aller jusqu'à une fermeture administrative de l'établissement. »
«Entre le bruit des moteurs et des klaxons, c’est l’enfer»
Outre les nuisances liées aux personnes dans les rues, les habitants du 9e se plaignent beaucoup du bruit causé par la circulation. La rue de Clichy et la rue Blanche en sont les principales victimes dans le 9e arrondissement. Géraldine habite rue de Bruxelles. Depuis quelques temps, le carrefour avec la rue de Douai est devenu invivable : «Il y a des feux de signalisation, donc à chaque redémarrage, c'est infernal», raconte-t-elle. «Et puis il y souvent des embouteillages : entre le bruit des moteurs et les klaxons, c'est vraiment l'enfer.»
INFOGRAPHIE. La pollution sonore à Paris
Pour résoudre le problème de la pollution sonore due à la circulation, la mairie de Paris a déjà envisagé plusieurs solutions, comme notamment la pose prochaine d'un bitume anti-bruit, qui absorbe le bruit de roulement des pneus. Prévu également, un réaménagement des grands axes de circulation pour les désengorger. Du côté de la RATP, l'adoption de bus hybrides ou électriques a permis d'améliorer la situation. La mairie a aussi mis en place des zones 30km/h dans plusieurs quartiers. Une transition progressive, qui a déjà affecté la rue Blanche dans le 9e. A noter cependant que les mesures effectuées par Bruitparif ont montré que le passage en zone 30 ne résolvait pas vraiment le problème, comme l'explique Fanny Mietlicki : «L'amélioration sonore ne se ressent vraiment que la nuit, moment où les voitures roulent le plus rapidement. La journée, la différence n'est pas vraiment audible.»

Carte de l'indicateur de bruit dû à la circulation Lden, exprimé en décibels, sur une journée complète dans le 9e arrondissement entre 2012 et 2016. ©JonathanGrelier/D9 avec ©Bruitparif
A l'issue de la réunion, les habitants de l'arrondissement présents n’étaient pas pleinement satisfaits : pour eux, le plus gros problème lié à la circulation, c'est celui des motos. «On paye un nouveau revêtement, on abaisse la limitation de vitesse, mais finalement rien n'est fait contre les motos ! C'est sans espoir !», grommelle un habitant. Géraldine non plus n'a pas été complètement convaincue : «Le bruit dans le 9e est un phénomène qui s'amplifie depuis des années, on en parle beaucoup mais on a l'impression que finalement, aucune solution vraiment efficace n'est proposée.»
Marie Fiachetti
Infos pratiques :
Liste des recours publiée par la mairie du 9e en cas de nuisances sonores : https://www.paris.fr/services-et-infos-pratiques/prevention-et-securite/la-lutte-contre-les-incivilites/nuisances-sonores-4818
Carte entière de l'indicateur de bruit Lden par Bruitparif : https://carto.bruitparif.fr/
Carte entière de l'indicateur de bruit Lden par Bruitparif : https://carto.bruitparif.fr/